Le dialogue social : une notion souvent utilisée mais mal définie
Derrière le mot « dialogue » on pense à : consultation, participation, débat, concertation, négociation… Derrière le mot « social », on suppose : questions de société liées aux conditions de travail et à la qualité de vie des citoyens…
Pourtant l’expression «dialogue social» si fréquemment employée, n’a pas de définition précise. On se réfère alors à celle que donne l’Organisation Internationale du Travail (nouvelle fenêtre) pour laquelle le «dialogue social» inclut toutes formes de négociation, de consultation ou simplement d’échange d’informations entre les représentants des employeurs : le patronat, et ceux des travailleurs : les syndicats, sur des questions d’intérêt commun liées à la politique économique et sociale.
Au niveau national, le «dialogue social» peut prendre la forme d’un processus tripartite lorsque le gouvernement y participe. Au sens plus étroit du terme, il renvoie généralement en France à ses deux composantes majeures que sont la négociation collective (nouvelle fenêtre) et les processus d’information et consultation des institutions représentatives du personnel (nouvelle fenêtre).
Quelles sont les conditions de base du dialogue social ?
- Présence des organisations de travailleurs (syndicats) et d’employeurs (patronat) dotées de compétences techniques nécessaires
- Une réelle volonté politique d’engager la concertation dans le respect des droits fondamentaux que sont la liberté syndicale et la négociation collective
- Un soutien institutionnel approprié : l’État doit fournir un soutien essentiel au processus de dialogue en mettant à la disposition des parties en présence un cadre juridique, institutionnel qui leur permette d’agir efficacement.
La notion de dialogue social présuppose donc que les parties en présence aient une culture de compromis, ce qui en France n’est pas toujours le cas, du côté patronal comme du côté syndical. Quant à l’intervention de l’État, quel que soit le gouvernement en place, elle est perçue parfois comme trop excessive quand il veut aller au delà des accords conclus entre partenaires sociaux, ce qui a, pour effet, d’entrainer des débats récurrents quant à sa légitimité.
Ce que dit la loi
C’est à la suite des manifestations du 1er trimestre 2006 hostiles au «contrat première embauche» (CPE), qui avaient été annoncées sans concertation préalable avec les organisations syndicales, que l’Assemblée nationale et le Sénat ont adopté la loi du 31 janvier 2007 sur la modernisation du dialogue social (nouvelle fenêtre).
Cette loi institutionnalise une procédure de négociation tripartite gouvernement/syndicats/patronat au niveau national pour les réformes portant sur des questions économiques et sociales de portée générale.
« Art. L. 101-1. – Tout projet de réforme envisagé par le Gouvernement qui porte sur les relations individuelles et collectives du travail, l’emploi et la formation professionnelle et qui relève du champ de la négociation nationale et interprofessionnelle fait l’objet d’une concertation préalable avec les organisations syndicales de salariés et d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel en vue de l’ouverture éventuelle d’une telle négociation. »
Les organisations syndicales d’employeurs et de salariés peuvent ainsi se saisir de tous les sujets qu’elles souhaitent traiter ou peuvent être sollicitées par le Gouvernement pour établir une négociation avant l’élaboration d’un projet de loi ou une concertation sur un programme gouvernemental.
Le dialogue social dans l’entreprise
Le 31 août 2017, le Gouvernement présentait le texte des ordonnances qui réforment le code du travail parmi lesquelles deux ordonnances sur le renforcement du dialogue social (nouvelle fenêtre).
- Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales
- Ordonnance n° 2017-1385 du 22 septembre 2017 relative au renforcement de la négociation collective, article 8
Depuis le 1er janvier 2018, il n’existe plus qu’une seule instance dénommée comité social et économique (CSE) (nouvelle fenêtre) qui regroupe à elle seule l’ensemble des instances représentatives du personnel (délégués du personnel, comité d’entreprise et comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail). Ces ordonnances ouvrent de nouveaux champs de négociation à l’entreprise, accélèrent la généralisation de l’accord majoritaire (obligatoire depuis le 1er mai 2018) et entérinent le principe du référendum à l’initiative de l’employeur : pour être valides, les accords d’entreprises doivent être désormais soit signés par des syndicats ayant obtenu au moins 50 % des suffrages exprimés aux élections professionnelles dans l’entreprise, soit par un référendum d’entreprise à la majorité sauf si des syndicats représentant plus de 70 % des suffrages exprimés s’y opposent.
Le dialogue social en France : un exercice parfois difficile
Malgré les récentes réformes et les textes de lois, le dialogue social reste en France un exercice difficile qui entraîne trop souvent l’émergence de conflits. Pourtant, le dialogue social est un facteur de vitalité démocratique, d’efficacité économique et de justice sociale. Les représentants du monde patronal et salarié se doivent de l’établir en recherchant le consensus. L’État, quant à lui, se doit d’endosser le rôle d’initiateur, de catalyseur et d’arbitre afin de favoriser le dialogue à partir de propositions claires et déterminantes, mais sans toutefois interférer de façon brutale sauf situation d’exception.
Pourtant en ce début d’année 2019, on est toujours en droit de se poser la question de l’efficacité de notre dialogue social à la française.
Il est essentiel pour notre société que le dialogue social joue pleinement son rôle. C’est un enjeu de taille. Tous, État et partenaires sociaux, en sont responsables.